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Article de François Schreuer paru dans le numéro d’octobre 2004 de la revue "Espace de Libertés"
Elaboré par des experts, vendu aux politiques, « Bologne » n’est en rien le résultat d’un débat public. Zoom arrière.
Même si l’on peut lui trouver des racines remontant loin dans le temps, il nous semble que la caractéristique la plus surprenante du « processus de Bologne » est, de prime abord, la rapidité de sa mise en œuvre. Depuis la déclaration toponyme de juin 1999, cinq ans à peine se sont en effet écoulés, et durant cette période, la plupart des pays européens ont réformé leur enseignement supérieur en vue de le conformer au nouveau modèle : la rentrée académique 2004 sera en effet, en Communauté française comme dans de nombreux pays européens, placée sous le signe du nouveau système. Certes, la grande diversité des modalités retenues par les différents pays participants peut tempérer quelque peu ce constat mais cette variété ne remet nullement en cause les aboutissants principaux de la réforme.
Bref, « Bologne » réalise d’un coup deux des figures politiques les plus difficiles : réformer rien moins que l’enseignement, rapidement, en profondeur et en ne soulevant pas de protestation majeure ; et obtenir un accord fort au niveau européen, là où, depuis vingt ou trente ans, les institutions de l’Union patinent à faire aboutir de maigres consensus sur la fiscalité ou les droits sociaux.
On peut caractériser à grands traits le modèle de l’enseignement supérieur belge par sa liberté d’accès formelle étendue [1] et par des frais d’inscription relativement modestes. Malgré un financement insuffisant et une politique sociale qui pêche par quelques lacunes, on peut dire que la Belgique dispose d’un des systèmes d’enseignement supérieurs les plus ouverts au monde. Il est en outre d’une qualité honorable.
Ceci n’est pas sans conséquences dès lors qu’entrent en jeu l’équivalence des diplômes et la mobilité étudiante, fût-elle réservée à une élite sociale. On voit mal en effet comment la Communauté française pourrait supporter, dans ses enveloppes budgétaires déjà trop serrées, un afflux important d’étudiants supplémentaires. Car si la liberté de circulation est un droit reconnu aux citoyens européens depuis le traité de Rome, les étudiants qui viennent étudier en Belgique aujourd’hui pour échapper à la sélection sévissant dans leur pays d’origine n’ont pas fini leur parcours d’obstacles en obtenant un diplôme. Les milliers de kinésithérapeutes français diplômés aujourd’hui des écoles belges — aux frais du contribuable belge — ne gagnent pas ipso facto le droit d’exercer en France. C’est donc peu dire que le problème va s’accentuer quand les diplômes seront équivalents.
Par exemple, on constate actuellement — et cette tendance va s’accentuer, comme l’illustre bien la récente réforme, par le gouvernement de M. Blair, des frais d’inscription dans les universités britanniques — de fortes divergences dans le montant des frais d’inscription. Divergences qui se répercutent évidemment sur les budgets publics et donc sur la fiscalité : le citoyen britannique paie beaucoup plus cher l’accès au service public mais paie moins d’impôts. Que la justice sociale soit perdante dans l’affaire est secondaire dans le présent raisonnement. S’il lui est possible d’aller suivre sur le continent des études payées par les contribuables locaux — ce que « Bologne » tend à nettement faciliter —, il sera deux fois gagnant. Ajoutons au rang des incitants à la mobilité qu’une uniformisation linguistique (vers l’anglais, faut-il le préciser ?) d’une partie de l’enseignement supérieur est en marche et l’on voit que l’absence d’uniformisation des politiques sociales et fiscales dans le cadre d’une ouverture totale des échanges mène à des effets de dumping qui mettent clairement en cause l’avenir des systèmes sociaux les plus solidaires.
Bref, sous cette pression, on peut s’attendre à court terme à une dégradation des conditions d’enseignement en Belgique. Dès à présent, la Belgique est financièrement poussée à durcir les conditions d’accès à son enseignement supérieur [2].
Pour autant, il serait ubuesque de défendre le maintien de complexités administratives à la seule fin de préserver un médiocre « chacun chez soi ». Le projet européen — et la liberté de circulation qui en fait consubstantiellement partie — reste un idéal. Mais c’est à des problèmes comme la dissymétrie de la liberté d’accès qu’auraient dû s’attaquer les politiques qui prétendent créer un « espace européen de l’enseignement supérieur ». Dans le même panier des questions non résolues, on peut aussi mettre celle du financement ou celle de la mobilité étudiante.
Car si le décret voté le 31 mars dernier par le Conseil de la Communauté française s’intitule pompeusement « Décret définissant l’enseignement supérieur, favorisant son intégration à l’espace européen de l’enseignement supérieur et refinancant les universités », de refinancement des universités, il n’a été question que très marginalement. Les universités — dont la plupart sont aujourd’hui financièrement sur les genoux — n’ont rapidement pas eu d’autre choix que de faire du vote du décret un enjeu vital, quitte à sacrifier un certain nombre de leurs revendications. L’intelligence de la ministre Dupuis, qui avait jusque là éprouvé de notoires difficultés à fédérer les responsables académiques, a été de lier le vote du décret à un ballon d’oxygène aux universités. Malheureusement, la course qui a suivi a mené à un texte d’une qualité désastreuse, laissant entre autres dans un vide juridique inquiétant plusieurs secteurs universitaires.
Quoi qu’il en soit, dans la configuration institutionnelle qui est actuellement la sienne, il ne semble pas que les moyens nécessaires à assumer les importants surcoûts liés à la réforme puissent être dégagés par l’institution francophone — et « Saint-Polycarpe » n’y changera pas grand-chose. L’allongement plus ou moins généralisé des études à cinq ans, en particulier, permet de prévoir une augmentation du nombre d’étudiants. Où est l’argent qui va servir à financer le personnel, les nouveaux locaux, les aides sociales ou les logements que cette augmentation de population va inéluctablement nécessiter ?
Quant à la mobilité, personne ne s’y oppose bien sûr sur le principe : qui serait contre l’opportunité donnée aux étudiants de se confronter à l’enseignement d’une université étrangère, l’apprentissage des langues ou la rencontre interculturelle ? Mais, face à cette vision idyllique, il faut noter que la mobilité étudiante, ne serait-ce que par le surcoût important qu’elle représente pour l’étudiant, est fort discriminante socialement. Et que mobiliser des budgets publics pour la rendre accessible au plus grand nombre est loin d’être évident : quand le logement ou les bourses d’études constituent des problèmes criants, la priorité est de permettre au plus grand nombre de faire des études ; pas de donner, à ceux qui ont déjà la chance d’accéder à l’université, la chance supplémentaire de voyager à l’étranger.
Mais revenons à notre question initiale : pourquoi tout cela a-t-il été si vite ? Si les conférences d’experts n’ont pas manqué et que les groupes de travail les plus variés prolifèrent, notamment dans le giron des conférences de recteurs et de la European Universities Association (EUA), on peut compter sur les doigts d’une main les rencontres au sommet entre ministres de l’éducation. De là à penser que l’essentiel du processus a échappé au politique, il y a un pas qu’il nous faut malheureusement franchir.
Car, au-delà du fait anecdotique que la déclaration de juin 1999 a été signée, pour la Communauté française, par le représentant du ministre Ancion qui était alors… en affaires courantes, « Bologne » n’est en rien le résultat d’un débat public, n’a nullement fait l’objet d’une appropriation démocratique [3]. « Bologne » a été conçu, vendu aux politiques, et réalisé par des « experts », dont la toute-puissance ne peut naître que du caractère prétendument technique des réformes en cours. Là se trouve sans doute une première réponse à notre question.
Décentralisation, technicisation des enjeux politiques, absence de tout texte juridiquement contraignant,… on peut sans doute parler ici d’un exemple de soft law : il y a bel et bien un processus juridique — il suffit de considérer la traduction, dans chacun des états concernés, des principes de « Bologne » en textes légaux – mais celui-ci relève, au départ, de l’informel le plus complet, et ne répond que dans un second temps, quand tout ou presque est déjà joué, aux formes habituelles de la production juridique.
L’argument massue utilisé pour parvenir à cette rapidité d’exécution tout en restant dans un cadre informel est celui de la concurrence dans laquelle se trouveraient les états et leurs institutions d’enseignement supérieur et du retard qu’il leur faudrait par conséquent éviter de prendre sur les autres. En substance, il consiste à dire que, même si les réformes proposées sont imparfaites, ne pas s’aligner très rapidement mène à l’isolement. Il est très difficile de lutter contre pareille argumentation, et les quelques mouvements sociaux qui ont entrepris de contester le processus s’y sont largement cassés les dents : il n’y a nulle part de parlement à interpeller, de ministre à contester, d’interlocuteur, tout simplement en fonction duquel organiser une revendication politique. L’échelle du processus dépasse de toute façon largement les frontières de l’Union européenne, celles des 15 comme celles des 25.
Bien sûr, l’isolement de ceux qui ne se sont pas (encore) alignés est très relatif. Et l’on peut penser a priori que prendre une ou deux années de plus pour mettre en œuvre le projet n’aurait posé aucun problème [4]. À ceci près que prendre le temps de poser les « vraies » questions aurait grippé la mécanique. « Bologne » aurait pu être un très beau projet, dédié à la poursuite de louables objectifs tels que la coopération interuniversitaire, les échanges culturels au sein de l’Union, l’affirmation d’un modèle social européen,… Mais le processus s’est réalisé selon une méthode qui le rend incompatible avec ces objectifs, pour une raison très simple : leur mise en œuvre est un projet politique lourd, impliquant de parler de questions difficiles telles que le financement ou l’accès à l’enseignement, ce qui ne peut se faire ni de manière consensuelle ni de manière informelle. On se trouve devant une gouvernance du fait accompli : comme on a ouvert les frontières à Rome sans harmoniser la fiscalité ou les lois sociales — ouvrant ainsi la porte à divers phénomènes de dumping —, on harmonise l’enseignement sans se préoccuper des questions de fond que cela soulève. La régulation devra venir — si elle vient ! — dans un second temps.
Quand bien même les faits suivraient ce scénario — une première étape où l’on libéralise, suivie d’une réglementation a posteriori —, il reste une période intermédiaire de relative anomie. C’est en cela, d’abord, que les politiques qui ont promu « Bologne » sont coupables : en dérégulant, ils ont, volontairement ou non, amplifié l’inféodation de l’enseignement supérieur aux logiques dominantes. Quelles sont ces logiques ? Quel est le contexte ? C’est ce qu’il nous faut examiner.
Deux questions retiennent particulièrement notre attention. D’une part le débat suscité par l’Accord général sur le commerce des services (AGCS) impose de plus en plus la question de la compétitivité des universités, dans la perspective éventuelle de la « libéralisation » du marché de l’enseignement supérieur. D’autre part, un phénomène plus diffus de marchandisation de l’enseignement mène à une redéfinition de la fonction et des pratiques de l’enseignement.
Si même les plus libéraux des dirigeants européens se sont jusqu’à présent montrés réticents à une ouverture du marché de l’enseignement supérieur, réclamée au sein de l’OMC par les Etats-Unis, l’Australie ou la Nouvelle-Zélande, ce n’est pas d’abord en raison de la pression démocratique ou d’un modèle de société, mais selon une position de nature purement tactique : il s’agit de commencer par rendre l’enseignement supérieur du vieux continent capable de tenir le choc de la concurrence extérieure — et de lui donner les moyens d’une politique offensive vers l’étranger. Pour y arriver, il faut commencer par créer une concurrence interne, après quoi il deviendra possible d’entamer la libéralisation du « marché du XXIe siècle ». Or la principale conséquence de « Bologne » n’est autre que le renforcement de la concurrence entre les institutions d’enseignement supérieur européennes.
Mais, avec l’AGCS, nous parlons essentiellement de « privatisation » de l’enseignement. La prise d’influence des marchands sur l’école — auxquels le laisser-aller ouvert par « Bologne » facilite la tâche — nous semble cependant relever d’une problématique plus large, pour laquelle le terme « marchandisation » est plus approprié. On peut définir la marchandisation d’un secteur de la vie comme son inféodation à des objectifs prioritairement économiques, et par conséquent par le refus de voir ses finalités définies par des choix collectivement délibérés. Ce faisant, on met en évidence le caractère essentiellement idéologique du problème. La marchandisation de l’enseignement est par exemple compatible avec le maintien d’une structure publique ! C’est aux modes de gestion des institutions d’enseignement supérieur, aux pratiques pédagogiques, aux contenus enseignés ou aux finalités données à l’enseignement supérieur qu’il nous faut alors nous intéresser.
Le processus de Lisbonne, qu’il est de bon ton de citer, ces temps-ci, dans les milieux dirigeants européens, sociaux-démocrates en tête, est l’un des référents principaux de cette nouvelle offensive. Selon « Lisbonne », l’Union doit devenir « l’économie de la connaissance la plus compétitive du monde ». Il ne nous semble pas possible d’interpréter cela autrement que comme une volonté de soumettre la définition des contenus de l’enseignement aux besoins du marché du travail. Et cette pression sur l’enseignement est loin d’être le fait des seuls milieux patronaux, de la Commission européenne dont on sait depuis longtemps le rôle très actif qu’elle joue en la matière, ou des seuls politiques de droite : c’est dans une quasi-unanimité aujourd’hui que la classe politique — et même certains milieux syndicaux — chantent une ode au redressement économique qui assigne comme tâche principale à l’enseignement supérieur la production de professionnels répondant aux besoins du marché de l’emploi.
On retrouve dans la déclaration de Bologne le pendant explicite de celle de Lisbonne dans l’objectif de l’employabilité [5] qui est assigné désormais à l’enseignement supérieur, en ce compris le premier cycle universitaire. Comme l’écrit Pierre Bourdieu, « l’autonomie que la science avait conquise peu à peu contre les pouvoirs religieux, politiques ou même économiques, et, partiellement au moins, contre les bureaucraties d’Etat qui assuraient les conditions minimales de son indépendance, est très affaiblie. Les mécanismes sociaux qui se sont mis en place à mesure qu’elle s’affirmait, comme la logique de la concurrence entre les pairs, risquent de se trouver mis au service de fins imposées du dehors […]. Bref, ajoute-t-il, la science est en danger et, de ce fait, elle devient dangereuse. » [6]
A cela, on peut ajouter la multiplication des contacts entre le secteur privé et le monde académique, l’arrivée d’un financement privé marginal mais souvent stratégique dans la mesure où il permet de réalisation de projets exceptionnels et très visibles, l’établissement dans certaines disciplines [7] de structures privées d’accréditation, visant à hiérarchiser les établissements (selon des critères souvent fort discutables),… les moyens de pressions du secteur privé sur l’université se multiplient, le discours des responsables académiques s’adapte à la nouvelle donne et les finalités de l’enseignement sont bel et bien aujourd’hui en train de changer.
A l’UCL, par exemple, on a vu ces dernières années les autorités de l’université faire appel au « mécenat » d’entreprise. Les fonds apportés ont permis le développement d’une vingtaine de chaires d’enseignement et de recherche (Glaverbel, Interbrew, Arcelor, Tractebel, GSK, Fortis,…) ainsi que la mise en place de différents équipements tels que des salles informatiques ou laboratoires de langue (BBL, Intel, Sun Microsystems, Siemens,…). Tous portent évidemment le nom des donateurs qui ont permis leur réalisation. Mais l’enjeu pour ces derniers dépasse largement la seule reconnaissance symbolique et l’élévation du capital culturel de quelques PDG. Dans certains cas, les conflits d’intérêts sont scandaleusement évidents (par exemple, le journalisme multimédia relève désormais à l’université de Louvain de la « chaire RTL », sponsorisée et codirigée par le groupe RTL). Dans tous les cas, ces partenariats se traduisent par une percolation du discours entrepreneurial dans l’université, non seulement à travers l’organisation de divers événements mondains mais aussi dans les structures de décision de l’université.
À travers « Bologne », c’est une digue qui a cédé et cet effondrement intervient à un fort mauvais moment, dans le contexte d’un rapport de force très favorable aux lames puissantes et nombreuses des logiques de l’hétéronomie dont nous venons de parler : les pressions marchandes plus ou moins directes sur le système éducatif ou l’idéologie de Lisbonne qui gangrène le monde politique européen.
Mais cet effondrement est aussi dû aux brèches qui étaient ouvertes, principalement au nombre de deux : l’absence d’une réelle démocratie européenne dans un espace dont les composantes ont un destin inévitablement commun d’une part et l’actuelle faiblesse idéologique du programme universitaire d’autre part. Deux urgences nous paraissent donc s’imposer.
D’abord, rouvrir un débat sur la fonction sociale de l’enseignement supérieur. Trop longtemps mise sous l’éteignoir, la question du pourquoi de l’université reste essentielle, parce que notre modèle est plus que jamais en crise. Assumons-nous l’instrumentalisation généralisée de la science ? Acceptons-nous de transformer les lieux de savoir et de liberté intellectuelle que sont encore les universités en de simples valets d’un développement économique érigé en idole ? Dans la négative, que faisons-nous pour éviter ces dérives ?
Ensuite, et c’est là un enjeu qui concerne tous les démocrates, il est particulièrement important que l’Europe se donne les moyens de créer massivement de la démocratie au niveau européen, particulièrement sur les matières sociales. Cela signifie qu’il faut d’une part démocratiser radicalement le fonctionnement de l’Union et d’autre part lui transférer en masse des compétences juridiques dans le cadre d’un projet clairement fédéraliste. Sans cela, il ne sera pas possible d’inverser la tendance. Pour cette raison la prétendue « constitution » européenne qui sera sans doute ratifiée dans les prochains mois constitue un recul très inquiétant par la consécration qu’elle représente d’une Europe intergouvernementale et structurellement orientée vers la seule coopération économique.
Liège, le 9 septembre 2004
[1] Mis à part l’examen d’entrée en sciences appliquées et en médecine vétérinaire et les différents numerus clausus en médecine, dentisterie et kinésithérapie, l’accès à l’enseignement supérieur reste formellement accessible à tout détenteur d’un diplôme du secondaire supérieur. Cette liberté d’accès, relative mais considérable au regard de la situation qui prévaut dans les autres pays européens, est cependant depuis quelques années en recul sensible.
[2] Ainsi, un examen d’entrée est organisé depuis peu en médecine vétérinaire pour répondre à l’arrivée de centaines d’étudiants français venus chercher en Belgique la possibilité de faire des études qui leur avait été refusée en France. Jean-Pierre Stroobants notait dans Le Monde du 2 octobre 2002 que Liège est devenue « la première école vétérinaire de France ».
[3] Le Conseil d’État notait, en janvier dernier, dans son avis sur l’avant-projet de décret « Bologne » qu’« un avant-projet d’une telle ampleur et d’une telle portée nécessite la rédaction d’un exposé des motifs complet et détaillé qui permette au lecteur des textes de comprendre tant les principes sur lesquels repose cette réforme que les mécanismes qui entendent en articuler la mise en œuvre concrète. Tel n’est pas le cas en l’espèce » (avis 36.275/2 de la section de législation du Conseil d’Etat).
[4] Au contraire, ç’aurait été le bon sens même. Malgré des efforts souvent réels de la part des responsables académiques à tous niveaux, il est évident que les nouveaux programmes ont été conçus à la va-vite : entre le vote du décret et son entrée en vigueur, six mois à peine se seront écoulés.
[5] Cette distinction conceptuelle entre la professionnalisation et l’employabilité relève selon nous surtout d’une certain préciosité qui empêche d’affirmer que l’enseignement universitaire est ou devrait être professionnalisant.
[6] BOURDIEU P. Science de la science et réflexivité, Paris : Raisons d’agir, 2001, p. 5-6.
[7] Le cas des écoles de gestion est à cet égard paradigmatique. Cf. WARDE I. « Irrésistibles ‘business schools’ » in Le Monde diplomatique, mai 2000.