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Ce mercredi 2 mai, c'était la "fête" à Louvain. Ouais, ouais. Il était question d'inaugurer la dernière folie de Marcel Crochet, de décerner quelques "honoris causa", et bien sur de réunir le gratin de la social-démocratie wallonne et apparentée. La Savate est donc allée serrer des paluches (et s'enfiler zakouski et verres de mousseux) pour vous.
Bon, d'abord sur la fameuse Aula, le bloc de verre à l'intérieur scandinave de type néo-Ikea qui a surgi il y a quelques mois du côté de la Grand-place. Nous passerons sur l'investissement dispendieux que cela représente, sur les petits impairs du chantier (la fosse d'orchestre, les vestiaires ou la cage à décors qui avaient été "oubliées" dans la version initiale du bazar) et sur les heures nocturnes supplémentaires faites pour terminer le chantier dans les délais pour nous arrêter sur les "bâtisseurs", "compagnons" et autres "artisans" de cette Aula un fifrelin mégalo. Les généreux donateurs sont effectivement nombreux et si l'on peut comprendre l'attachement légitime de Monsieur et Madame Marcel Crochet à leur alma mater, la présence (massive) de tout le monde industriel belge dans l'histoire (de RTL-TVI aux cimenteries CBR) donne quelque peu froid dans le dos, surtout en cette période où la privatisation de l'enseignement est un sujet si particulièrement sensible. Sinon, que dire, que ce magnifique duplex, (bientôt) meublé, vue imprenable sur le lac, parking à volonté, sera strictement hors de prix pour les étudiants qui hors des quelques cours qui y seront dispensés, n'auront sans doute pas souvent accès à ce splendide édifice (appel subliminal : à quand un congrès de la FEF dans la grande Aula ?).
Venons en donc aux discours, puisque c'est bel et bien une rubrique 'people' que La Savate inaugure ici (sans doute très provisoirement). Tout d'abord, il faut souligner que la délégation étudiante était franchement surnuméraire, à la suite d'une interaction complexe (que nous ne détaillerons pas) entre le président de l'AGL, les places dont il disposait et les membres de son comité. Bref, il y a beaucoup d'étudiants (cela est évidemment très relatif si on compare leur nombre à celui des généreux mécènes dont il a déjà été question).
Marcel Crochet, qui ne s'est pas embrouillé dans ses "attendus que" au moment de remettre les insignes "honoris causa", a dialogué pendant toute la cérémonie avec une vidéo qui tout à la fois, faisait de l'UCL un acteur de la modernité et préfigurait un futur spot de pub très réussi (et oui, l'UCL perd des étudiants). Ainsi, nous apprîmes que nos professeurs étaient des enfants de mai 68 (par contre les mots "walen buiten" ne furent pas prononcés, présence de la KUL oblige), que mai 68 et Vatican II procédaient du même processus de modernité (ce qui reste malgré tout un tout petit peu forcé), que l'UCL compte se faire membre de Greenpeace, d'Amnesty International et de la Confédération paysanne, que le culpabilisakot a des chances d'être créé l'année prochaine et plein d'autres choses très intéressantes (entre Mao et Marks & Spencer). On saluera quand même l'initiative totalement spontanée du recteur qui laissa un siège vide en l'honneur d'Aung San Suu Kyi, prix Nobel de la Paix et militante des droits de l'Homme en Birmanie, Docteur Honoris Causa de l'UCL, assignée à résidence en Birmanie par la junte militaire au pouvoir.
Vint ensuite le plat de résistance : le discours du président de l'AGL. Alexandre Chaidron a très justement brossé le tableau d'un enseignement supérieur menacé dans ses missions "universitaires" par l'offensive néo-libérale à laquelle l'ensemble du service public doit aujourd'hui faire face partout dans le monde. Son discours est repris par ailleurs dans ce numéro de La Savate, nous ne pouvons que vous encourager à le lire, en même temps que de profiter de cette occasion pour féliciter Alex de sa brillante prestation. Encore une chose : il a été le seul intervenant à être coupé par les applaudissements de la salle, ça mérite d'être souligné.
Ces propos, Amin Maalouf, qui a eu l'immense amabilité de nous accorder quelques minutes d'entretien, abonde entièrement dans leur sens : "il est inadmissible que la logique marchande, le pouvoir de l'argent, prenne le pas sur la culture, le savoir, l'art et la science. Il est du devoir des penseurs, des artistes, des scientifiques, des intellectuels de se mobiliser pour dénoncer les dérives mercantiles dont notre société est aujourd'hui victime de plus en plus régulièrement". Soulignons par ailleurs le discours remarquable et remarqué (incontestablement premier à l'applaudimètre) du même Amin Maalouf sur la nécessité de l'attitude du doute dans l'expérience de toute croyance et de toute conviction, de nature religieuse ou autre.
Tout au contraire du professeur Oosterlinck, recteur de la KUL, qui vient splendidement corroborer les craintes exprimées par Alexandre Chaidron. Ce libéral pur jus a ainsi besoin de peu de mots pour nous permettre de nous faire une certitude, lui qui nous parle d'une université "d'élite [...], concurrentielle, [...] rentable, [...] efficiente". Magistral. Pour rappel, ce même personnage déclarait récemment dans "Le Monde Economie" que "L'économie et l'université doivent se réconcilier", que "Bill Gates n'est pas un exemple pour les jeunes, c'est un demi-dieu [...]", que "la KUL entend désormais réussir le pari de garder les meilleurs des siens. Quitte, comme elle le fait, à les pousser, dans la dernière phase de leurs études, à n'utiliser que l'anglo-américain. Souci de réalisme à l'égard de ces premiers clients que sont nos étudiants" ou encore que "Ingénieur, et donc formé pour rendre optimale l'utilisation des moyens disponibles, j'estime que nous sommes au service de tous nos clients". Sans commentaire.
Du côté de la Communauté universitaire, l'accueil fait à ce fier discours était plutôt glacial. Ainsi, Francis Delpérée nous confiait que les propos de M. Oosterlinck "étaient fort froids à l'égard de la communauté universitaire néo-louvaniste, manquaient cruellement de contenu et étaient inquiétants à plus d'un titre". Sa réaction au discours de notre président, "parfait", était elle aussi sans ambages : "ce qu'a dit Alexandre Chaidron à propos de l'harmonisation européenne de l'enseignement supérieur, reflète un sentiment très largement partagé par l'ensemble de la Communauté universitaire".
La ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche scientifique, Françoise Dupuis, quant à elle, bien que trouvant le représentant des étudiants "un peu trop inquiet", ne manquait pas d'abonder dans son sens sur la nécessité de conserver à l'enseignement un caractère intégralement public. Elle se tirait avec les pires difficultés diplomatiques, et par un joli changement de sujet, de la question de savoir ce qu'elle avait pensé du discours du recteur de la KULeuven. Tout ce qu'elle voulut bien nous dire, c'est qu'il "est bien naturel que des universités soeurs organisent des activités en commun [...], toutes les universités n'ont pas 575 ans". Merci de l'info, madame la ministre.
Signalons aussi Jean-Jacques Viseur, ancien ministre des Finances et président du Conseil d'Administration de l'UCL, qui ne prend pas la peine de citer les étudiants dans les destinataires de son allocution d'entrée, en les reprenant, nous a-t-il expliqué, dans les "membres de la Communauté universitaire", alors qu'il détaillait avec force "éminences (grises ?), ambassadeurs, messeigneurs, ministre-présidents" et autres "grand moufti du sérail" ou "vice-procurateur du collège de pataphysique" (allez, on exagère un peu) les autres assistants à la cérémonie. On ne rappellera jamais assez que si l'université existe, c'est peut-être un peu parce qu'il y a des étudiants. Par contre, M. Viseur s'est longuement étalé en remerciements aux mécènes qui ont permis la création de cette aula magna.
Nous noterons à ce propos l'intervention touchante du professeur Ignace Vandevivere, par ailleurs directeur du musée de Louvain-la-Neuve, qui, en présentant la candidature du peintre allemand Gerhard Richter à la nomination aux distinctions suprêmes de notre alma mater, ne s'est pas privé d'insister sur le potentiel donatoire (à ne pas confondre avec le cocktail "dînatoire") des "très généreux mécènes" en plaidant sa cause et en se faisant le défenseur des grandes vertus morales que notre université catholique cultive depuis 575 ans (merci madame la ministre) : "il serait bon que les dépositaires de tels chefs d'oeuvre, dit-il en parlant des oeuvres du peintre susnommé, prennent conscience de la vanité de la possession personnelle et se rendent compte que ces oeuvres d'art trouveraient une bien meilleure place dans un musée... le nôtre de préférence". On ne peut que lui souhaiter qu'un tel élan ait lieu parmi les "très généreux donateurs". Amen.
Encore, Armand Delcampe, gourou théâtral louvaniste, lui, cultive définitivement l'art de lancer des gouttes d'eau dans les friteuses allumées: ça grésille cinq secondes, puis c'est tout de suite résorbé ("le tout dans notre baraque à frites qui s'appelle le Jean Vilar", pour reprendre ses propres termes).
Que dire enfin ? Que parmi les petits cartons d'invitation (dont le système était extrêmement complexe), Charles-Ferdinand Nothomb était dans les blancs cassés (ternis diraient les mauvaises langues), que Joëlle Milquet était dans les bleus (décidément, cette bonne vieille Joëlle nous étonnera toujours), que le Ministre d'État Pierre Harmel fut une crème de gentillesse, en prenant un quart d'heure pour raconter à deux étudiantes d'échange américaines le temps où il était Premier Ministre, que le groupe de Jazz qui parsemait l'atmosphère de ses airs incertains se nommait le "UCL Jazz Band", que les zakouski étaient franchement fameux (aaaah), que la délégation étudiante envisagea un bref instant de chanter l'Internationale (ce qu'elle ne fit finalement pas selon l'avis unanime de ses voisins de balcon), qu'il y avait quatre types attifés comme dans Johan et Pirlouit, qui en plus de démontrer que le ridicule ne tue pas, s'époumonaient à souffler dans des trompettes moyenâgeuses, que notre envoyé spécial dans le cortège rectoral n'ayant malheureusement pas eu le temps de nous faire rapport, nous ne pourrons rien vous dire de l'ambiance qui régnait au sein dudit cortège, mais ça avait pas l'air d'être triste.
Quant à Olivier Maingain, et ça nous servira de conclusion, qui venait décompresser après l'accord du "Lombard" et qui n'avait visiblement pas grand chose à faire des questions traitées lors de cette séance académique, il nous répétait - une telle tenacité, c'est admirable - que "tant que les francophones ne seraient pas d'accord entre eux, vraiment, les flamands pourraient continuer à avoir ce qu'ils veulent". Bon courage Olivier, on est tous avec toi...