Warning: Undefined variable $request_uri_reel in /home/clients/f61b1c4abc049173e0b139414b87511f/sites/archive.agora.eu.org/savate/header.inc.php on line 46 ![]() Warning: Undefined variable $request_uri_reel in /home/clients/f61b1c4abc049173e0b139414b87511f/sites/archive.agora.eu.org/savate/header.inc.php on line 46 Article paru dans La Savate n°278, lundi 2 décembre 2002 Liberté d'accès Warning: Undefined variable $cadre_texte in /home/clients/f61b1c4abc049173e0b139414b87511f/sites/archive.agora.eu.org/savate/calcul-article.php on line 74 Warning: Undefined variable $imprimer in /home/clients/f61b1c4abc049173e0b139414b87511f/sites/archive.agora.eu.org/savate/calcul-article.php on line 85
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Il était question dans les derniers numéros de la Savate (ainsi "le lundi 11 novembre) de la question de la liberté d’accès à l’université. Peut-être certains ont-ils, comme moi, été assez étonnés du ton général des articles. Ainsi, que pouvait-on lire "à la une" le 11 novembre ? Tout d’abord une prise de position claire en faveur de cette fameuse liberté d’accès. Soit. Mais pourquoi donc, cette prise de position ? Parce que l’on s’aperçoit, depuis quelques années "déjà que le libre accès à l'université est mis à mal au sein de notre Communauté française, qu'une tendance croissante à la remise en cause du principe même de la liberté d'accès est en train de s'insérer dans les esprits de nos responsables politiques, de nos responsables d'université et parfois même dans les esprits de certains étudiants". Ce sont surtout les derniers mots qui sont particulièrement choquants ! On peut effectivement défendre le principe de la liberté d'enseignement sur les plans philosophique, économique ou éthique, mais cela n’en affecte pas sa nature fondamentale : il s'agit d'une position politique. Et à ce titre, il doit pouvoir être débattu. Or, à lire l'article précité, les étudiants qui oseraient le remettre en question ne seraient que des déviationnistes réactionnaires. Mais heureusement pour ces égarés, l’AGL, gardienne du dogme, est là pour les remettre dans le droit chemin. On croit rêver. N’est-ce pas là la marque d’un véritable totalitarisme intellectuel ?
Mon propos n’est pas de vouloir privatiser l’enseignement supérieur ou de le rendre seulement accessible aux classes socialement aisées, que du contraire. Je voudrais simplement montrer qu’ici comme ailleurs, trop de principes tuent le principe. Que les choses soient claires. Il est tout à fait anormal que des jeunes renoncent à l’université, ou échouent dans leur parcours universitaire pour des motifs matériels. Tout comme est profondément injuste le fait que des personnes renoncent à aller chez le médecin ou le pharmacien pour des raisons financières. Les bourses d’études sont indispensables et devraient d’ailleurs être revues à la hausse. Mais à côté des conditions matérielles qui sont requises afin de faire des études dans de bonnes conditions, il existe également des conditions plus “intellectuelles”. Et je ne peux qu’être d’accord avec l’article de la semaine passée quand il dit que “Toute personne capable de suivre des études doit y avoir accès, sans préjudice de son origine sociale ou culturelle”. Encore faut-il s’entendre sur le sens du mot “capable”. Peut-on vraiment prétendre que le diplôme d’études secondaire est un bon indicateur de cette capacité ? Non, bien sûr, il faut être honnête ! Décrocher un tel diplôme il y a quarante ans ou aujourd’hui n’a pas du tout la même signification. La massification de l’enseignement secondaire est passée par là (et c’est une bonne chose), avec comme conséquence logique que ce diplôme s’est banalisé et ne veut plus dire grand chose. Il faut donc trouver de nouveaux repères.
Je voudrais citer un simple exemple pour illustrer mon propos. Une université francophone (les Facultés Saint-Louis pour ne pas les citer) réalise chaque année un test de maîtrise de la langue française en début de 1re candidature. Ce test, obligatoire, n’a néanmoins aucune influence sur la moyenne de l’étudiant. Que constate-t-on en fin de 1re candidature ? Tout simplement une très forte corrélation entre les étudiants qui ont raté le test de langue française et ceux qui ont raté leur première année d’université. Ce qui n’est pas étonnant quand on connaît l’importance que revêt une bonne maîtrise de la langue, surtout dans les sciences humaines, mais pas exclusivement. Partant de ce constat, deux approches sont possibles. Soit on part du principe que c’est en 1re candidature que l’étudiant va acquérir la maîtrise de la langue française (chose qu’il n’est pourtant pas parvenu à faire en 12 années d’enseignement primaire et secondaire, même si ce n’est évidemment pas toujours de sa faute). Et cela s’appelle de la démagogie. Soit on essaie autre chose, cet autre chose, cela peut-être dissuader ce futur étudiant d’entamer les études qu’il souhaitait. Cela se passe déjà à l’UCL, en éducation physique : sur le papier, il suffit d’être en possession d’un diplôme de l’enseignement secondaire pour s’inscrire en 1re candidature. Mais on imagine que l’étudiant qui rate dès le mois de septembre tous les tests physiques a plutôt intérêt à essayer autre chose, même si formellement, il n’est pas obligé de le faire.
Dans un tel système, tout le monde est gagnant : l’étudiant réorienté, qui ne perd pas un an dans une une filière qui ne lui conviendra pas; la collectivité, quand on connaît le coût d’une année universitaire pour celle-ci; les autres étudiants, qui bénéficieront d’un meilleur encadrement et de plus de moyens. Malheureusement, oser faire ces constatations simples, c’est s’opposer à la pensée unique qui règne parmi ceux qui prétendent incarner le mouvement étudiant. Dire cela, c’est élitiste. Ah oui ? Et pourquoi ? L’argument est connu : tout le monde n’a pas eu la chance de fréquenter les meilleures écoles dans l’enseignement secondaire, et donc les chances sont inégales face à une éventuelle présélection à l’entrée de l’université. Si la proposition peut paraître généreuse, c’est pourtant se tromper de problème : c’est faire payer à l’université les carences du secondaire. Cela revient à dire que puisque l’examen d’entrée serait discriminatoire (ce qui est faux), il faut laisser tout le monde rentrer en 1re candi, sans guère se préocupper des coûts faramineux que cela entraîne.
Alors pourquoi cette allergie complètement irrationnelle à la moindre proposition de présélection ? Probablement aussi parce que tout le monde à en tête l’exemple du numerus clausus dans les facultés de médecine. Celui-ci comprend deux éléments qui ne peuvent que le rendre impopulaire : tout d’abord, un nombre limité de places permettant d’accéder au diplôme de docteur en médecine, ce qui va effectivement déboucher sur une concurrence malsaine entre étudiants (celui qui est assis à côté de moi dans l’auditoire est un rival) et d’autre part, une sélection qui a lieu trois ans après le début des études, ce qui est évidemment beaucoup trop tard. L’exemple malheureux et condamnable du numerus clausus en médecine est l’exemple le plus facile à agiter, mais pourquoi ne parle-t-on pas plus de ce qui se passe pour les ingénieurs civils ? Dans cette faculté, l’admission est subordonnée à un examen et tout qui le réussit peut entamer ces études. La présélection se fait avant la rentrée académique et le nombre de places n’y est pas limité. Le résultat est là : cette faculté connaît le plus faible taux d’échec en fin de 1re candidature ! Balayer cet exemple du revers de la main au nom de peudo-principes est tout à fait irresponsable et décrédibilise ceux qui prétendent défendre les intérêts étudiants.
Etre étudiant, avoir la chance de fréquenter l’université, cela doit d’abord servir à acquérir un esprit critique. Faire peuve d’esprit critique, c’est souvent prendre ses distances avec les institutions, les médias ou l’Université, mais c’est parfois aussi oser aller à contre-courant du discours propre au petit microcosme étudiant, trop facilement démago-utopiste.